L’escalade des droits de douane américains sur les produits canadiens inquiète de plus en plus les entreprises canadiennes. Au cours de l’été 2025, le différend commercial s’est intensifié : les États-Unis ont porté leurs droits de douane généraux sur les importations canadiennes à 35 % (au lieu de 25 %), bien qu’ils aient exempté les produits visés par l’Accord Canada – États-Unis – Mexique (ACEUM) (source : tax.thomsonreuters.comreuters.com).
Le Canada a pour sa part modéré sa stratégie de représailles, supprimant de nombreuses contre-mesures tarifaires en septembre pour démontrer sa bonne volonté (source : reuters.com). Si ces mesures ont permis de rétablir le libre-échange de la majorité des produits, certains secteurs clés – dont l’acier, l’aluminium et l’automobile – restent soumis à des droits de douane élevés de part et d’autre de la frontière (sources : reuters.com canada.ca). La dynamique de nos échanges commerciaux avec les États-Unis demeure donc volatile, ce qui continue de créer de l’incertitude chez les employeurs canadiens, même si certaines mesures d’allègement sont mises en place.
Décortiquer le différend tarifaire : brève chronologie (hiver – printemps 2025)
Toutefois, la situation du Canada reste inchangée : les droits de douane américains de 25 % sur les produits canadiens (et de 10 % sur l’énergie et la potasse) restent fermement en place (reuters.com). En d’autres termes, les États-Unis excluent le Canada (et le Mexique) de cette vaste pause tarifaire, car ces tarifs ont été adoptés pour des raisons de sécurité frontalière distinctes (toronto.citynews.ca). Les contre-tarifs du Canada sur les produits américains restent également en vigueur, y compris les nouveaux droits de 25 % sur les importations d’automobiles américaines qui viennent d’être mis en place.
(En résumé de ce qui précède, après une accalmie temporaire en février, les droits de douane ont repris; les États-Unis ont taxé la plupart des exportations canadiennes à hauteur de 25 % (à l’exception de certains secteurs d’activité) et le Canada a appliqué ses propres contre-tarifs de 25 % sur un large éventail d’importations américaines. Le secteur de l’automobile a bénéficié d’un bref sursis, mais au début d’avril il était dans la ligne de mire des deux parties).
Avec l’escalade des tarifs douaniers au printemps, l’attention s’est tournée vers la diplomatie et le changement politique. Fin mars, après que Mark Carney est devenu Premier ministre, il s’est entretenu avec le président Trump et a convenu d’entamer des « négociations globales » devant mener à une nouvelle relation économique et de sécurité immédiatement après l’élection fédérale au Canada. Les deux parties ont exprimé leur volonté de trouver une solution à plus long terme. Dans l’intervalle, le ministre canadien Dominic LeBlanc et le secrétaire américain au commerce Howard Lutnick ont mené des discussions techniques afin de répondre aux préoccupations commerciales urgentes. Toutefois, le Canada a clairement indiqué qu’il ne reculerait pas : M. Carney a informé M. Trump que le Canada appliquerait des contre-tarifs pour protéger ses travailleurs à la suite des mesures prises par les États-Unis le 2 avril.
L’élection fédérale canadienne a eu lieu le 28 avril 2025, au milieu de cette agitation commerciale. Le résultat a assuré le maintien de l’approche canadienne : le gouvernement libéral de M. Carney a été réélu, bien que minoritaire. Le Premier ministre Carney avait explicitement cherché à obtenir une forte majorité pour renforcer la position du Canada dans les négociations tarifaires avec M. Trump, mais il aura désormais besoin du soutien d’autres partis pour gérer le conflit. Dans son discours de victoire, il a adopté un ton résolu sur le commerce, déclarant que « notre ancienne relation avec les États-Unis, une relation fondée sur une intégration sans cesse croissante, est terminée ». Il a reconnu que le système de libre-échange d’après-guerre arrimé aux États-Unis n’était plus fiable et a promis que le Canada s’adapterait à cette nouvelle réalité. Il a ainsi annoncé un changement de politique visant à diversifier les partenariats commerciaux et à renforcer l’autosuffisance économique. Des alliés tels que l’Union européenne se sont ralliés au Canada – les représentants de l’UE ont insisté sur la défense d’un commerce libre et équitable avec le Canada et d’autres partenaires du G7 –, ce qui laisse entendre que le Canada renforcera ses liens avec l’Europe et d’autres pays en guise de contrepoids.
Après l’élection, la position du gouvernement canadien sur les droits de douane est restée ferme. Tous les premiers ministres provinciaux et territoriaux ont présenté un front uni avec le premier ministre pour s’opposer aux mesures commerciales des États-Unis. Lors d’une discussion conjointe au début du mois d’avril, les premiers ministres du Canada ont condamné les tarifs douaniers américains qui mettent en péril des milliers d’emplois de part et d’autre de la frontière. Ils se sont mis d’accord sur une stratégie de réponse qui « maximiserait les effets aux États-Unis, réduirait au minimum les effets sur les Canadiens et éviterait l’escalade d’une crise commerciale ». Le gouvernement fédéral s’est notamment engagé à utiliser toutes les recettes tirées des contre-tarifs pour soutenir les travailleurs et les entreprises du Canada touchés par le différend. Cette approche traduisait la détermination du Canada à maintenir des mesures de représailles tout en restant pragmatique, c’est-à-dire à continuer d’exercer une pression sur les États-Unis tout en protégeant autant que possible sa propre économie.
Une diplomatie de haut niveau s’est mise en place dans les semaines qui ont suivi. M. Carney et M. Trump se sont rencontrés en tête-à-tête à la Maison-Blanche le 6 mai 2025, dans le but de rétablir les relations. La réunion, qui a comporté un entretien individuel de 75 minutes, a été qualifiée de « très positive » par M. Carney. M. Trump a adopté un ton étonnamment cordial, disant que le Canada est un « endroit très spécial » et plaisantant sur le fait qu’il ne recherchait que « l’amitié », tandis que M. Carney a fermement réfuté les réflexions à moitié sérieuses de M. Trump sur l’annexion du Canada par les États-Unis en lui disant que « le pays n’est pas à vendre ». Les deux dirigeants ont convenu de redémarrer la négociation des relations commerciales, M. Trump s’engageant à travailler sur un nouvel accord commercial entre le Canada et les États-Unis. Ils ont également abordé des questions plus générales telles que la guerre entre la Russie et l’Ukraine et le dossier chinois. Ce sommet, qui s’est tenu au début du mois de mai, a donné un ton constructif et a conduit à la formation d’équipes de négociation de part et d’autre. À l’issue de la rencontre, M. Carney a souligné que le Canada répondrait aux préoccupations des États-Unis en matière de sécurité (par exemple, en contribuant encore plus à la lutte contre la drogue à la frontière nord), mais qu’il insisterait en retour sur un commerce stable et équitable.
Malgré l’aspect positif de la situation en mai, il est apparu clairement au cours de l’été que les négociations allaient se prolonger. La volonté de parvenir à un accord avant la mi-juillet a été remise en cause par la persistance de positions intransigeantes. À la fin du mois d’août, M. Carney a explicitement opté pour une « approche modérée » du différend, optant pour un assouplissement des contre-mesures afin d’assurer la poursuite des négociations. « Soyons clairs, nous avons le meilleur accord du monde à l’heure actuelle », a déclaré M. Carney, faisant référence au libre-échange largement intact sur la plupart des produits dans le cadre de l’ACEUM. Il a fait valoir qu’aucun autre pays ne jouit de l’accès aux États-Unis dont bénéficie encore le Canada, même si la situation est « différente de ce qu’elle était auparavant ». Pour l’avenir, le Canada se concentre sur la résolution des droits de douane sectoriels restants et sur la révision de l’ACEUM en 2026 – une occasion de renforcer et d’actualiser l’accord commercial. Dans leurs déclarations publiques, les responsables canadiens soulignent que le renouvellement de l’ACEUM est essentiel pour protéger le pays contre l’élargissement des droits de douane. Bref, l’été a été marqué par un mélange d’escalade et d’assouplissement partiel : la guerre tarifaire a fait monter les droits de douane à 35 %, mais une trêve implicite protège désormais la plupart des industries, à l’exception de quelques secteurs stratégiques. Le défi politique pour le premier ministre Carney consiste à trouver un équilibre entre fermeté et pragmatisme – une position qui a suscité certaines critiques au Canada. Les dirigeants de l’opposition l’ont accusé de se montrer trop doux après avoir fait campagne sur la nécessité de tenir tête à M. Trump. Quoi qu’il en soit, le gouvernement fédéral et tous les premiers ministres continuent de présenter un front uni pour défendre les intérêts canadiens, et les canaux diplomatiques restent très ouverts alors que les deux nations cherchent à sortir de l’impasse.
Alors que les responsables gouvernementaux s’efforcent de trouver des solutions, de nombreux lieux de travail canadiens subissent les conséquences du conflit tarifaire non résolu. La menace – et la réalité – d’une escalade des droits de douane sur les produits canadiens a créé une incertitude considérable pour les entreprises. Les employeurs ont été confrontés à des décisions difficiles dans cet environnement instable. Les conséquences les plus courantes sont le gel des embauches ou la révision des plans d’embauche, le report des projets d’investissement, le resserrement des budgets et, dans certains cas, des licenciements et des réductions de production.
Malheureusement, ces scénarios se sont concrétisés dans différents secteurs. Au début du mois d’avril, un certain nombre d’entreprises ont annoncé des réductions d’effectifs en citant les droits de douane américains comme facteur déterminant (bnnbloomberg.ca). Par exemple, le constructeur automobile Stellantis a temporairement interrompu la production de son usine d’assemblage de Windsor, en Ontario, pendant deux semaines, ce qui a entraîné le chômage technique d’environ 3 200 employés. L’entreprise a directement attribué cette pause aux nouveaux droits de douane imposés par les États-Unis sur les véhicules et les pièces importés, qui ont perturbé sa chaîne d’approvisionnement transfrontalière. Dans un autre cas, le fabricant Eascan Automation, de Winnipeg, a mis à pied environ un tiers de son personnel à la fin du mois de février en raison de projets retardés par les clients dans un contexte d’incertitude économique; le coût de l’aluminium devait augmenter de près de 50 % compte tenu des droits de douane, ce qui érodait la demande de nouveaux équipements. Dans un exemple plus radical, le fabricant de meubles Prepac Manufacturing a annoncé la fermeture de son usine de Delta, en Colombie-Britannique, pour transférer sa production en Caroline du Nord. Le syndicat représentant les travailleurs a dénoncé cette décision, estimant que l’employeur « utilisait les droits de douane comme excuse », ce qui montre que certaines entreprises ont décidé de transférer leurs activités aux États-Unis pour contourner les frictions commerciales. Ces exemples montrent que les répercussions de la guerre tarifaire se font sentir des deux côtés de la frontière, frappant les entreprises et les travailleurs canadiens de manière tangible.
À mesure que le conflit se prolongeait pendant l’été, ces effets devenaient plus évidents dans les données macroéconomiques. Les entreprises qui s’étaient abstenues de procéder à des changements majeurs dans l’espoir d’une résolution rapide ont dû reconnaître que l’incertitude persisterait. Le secteur manufacturier canadien, en particulier, a connu une baisse de l’emploi. En juillet 2025, le nombre de personnes employées dans l’industrie manufacturière a diminué d’environ 10 000 par rapport à l’année précédente, les entreprises liées à la production d’acier, d’aluminium et d’automobiles ayant réduit leurs embauches et procédé à des licenciements (source : aljazeera.com). Le Syndicat des métallos rapporte qu’environ 1 000 de ses membres au Canada ont été mis à pied jusqu’à présent en raison des droits de douane, et il craint que ce chiffre n’augmente si les conditions ne s’améliorent pas. Dans l’ensemble, l’économie canadienne a perdu au net 40 800 emplois en juillet, et le taux de chômage national a grimpé à 6,9 % – ce taux étant le plus élevé depuis plusieurs années (exception faite de la pandémie). Les analystes attribuent une grande partie du recul de juillet aux retombées des tarifs douaniers sur l’industrie manufacturière et les secteurs connexes. Bref, plus le conflit commercial persiste, plus ses effets s’étendent, allant de la fermeture de certaines usines au marché de l’emploi dans son ensemble. Pour les employeurs, cela signifie qu’il faut sans cesse évaluer et réévaluer les plans de main-d’œuvre à la lumière du contexte propre à l’entreprise et de la conjoncture économique en général.
Les entreprises canadiennes sont également confrontées à des difficultés opérationnelles qui vont au-delà de la dotation en personnel. Les annonces successives de hausses et de baisses des droits de douane ont particulièrement touché les entreprises qui dépendent du commerce transfrontalier. De nombreux responsables de chaînes d’approvisionnements se sont retrouvés dans des situations en dents de scie : expédiant d’urgence des marchandises de l’autre côté de la frontière avant l’entrée en vigueur de nouveaux droits de douane, puis s’efforçant de réacheminer ou de retenir les stocks lorsque les politiques changent à la dernière minute. Les experts en logistique et les courtiers en douane signalent que leurs clients interrompent régulièrement leurs livraisons à l’approche de l’annonce de droits de douane par la Maison-Blanche, puis paient des frais d’entreposage et de transport élevés pour acheminer rapidement les marchandises pendant les brefs répits. Ce climat erratique fait qu’il est extrêmement difficile pour les entreprises de planifier avec certitude leur production, leurs prix ou leurs stocks.
Comme l’a fait remarquer le chef de la direction de la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique, « les entreprises ont besoin de certitude pour fonctionner (...) et investir », et actuellement la certitude se fait rare (source: bnnbloomberg.ca). Ce contexte de turbulences ouvre des possibilités pour certains secteurs d’activité. Certaines organisations cherchent à ramener des processus au Canada ou à trouver des fournisseurs nationaux pour réduire l’exposition aux droits de douane américains, ce qui pourrait stimuler les industries d’approvisionnement canadiennes. (Par exemple, un fabricant canadien de produits alimentaires pourrait acheter ses ingrédients localement plutôt qu’aux États-Unis afin d’éviter les coûts d’importation, ce qui créerait de nouveaux débouchés pour les exploitations agricoles canadiennes.) À l’inverse, d’autres entreprises ont fait le choix difficile de déplacer certaines de leurs activités aux États-Unis pour échapper aux droits de douane. Comme nous l’avons déjà mentionné, quelques fabricants canadiens ont transféré une partie de leur production au sud de la frontière avant l’augmentation des droits de douane, sacrifiant ainsi des emplois canadiens pour préserver leur accès au marché américain. La situation de chaque entreprise est unique, mais pratiquement toutes sont engagées dans une forme ou une autre d’analyse coûts-avantages concernant les droits de douane – qu’il s’agisse d’absorber des coûts plus élevés, d’adapter les modèles d’entreprise ou de restructurer la main-d’œuvre – et ce, dans un contexte de l’incertitude commerciale.
En plus de tout cela, les employés eux-mêmes se sentent vulnérables. Les périodes d’incertitude économique ont tendance à accroître l’anxiété des employés, et ce conflit commercial ne fait pas exception. Vos employés sont probablement au courant de l’actualité et s’inquiètent peut-être de la sécurité de leur emploi, en particulier dans les secteurs directement touchés par les droits de douane. Ils subissent également les conséquences plus générales de l’inflation et de l’augmentation du coût de la vie, et ils voient leur épargne-retraite fluctuer. (Par exemple, au début du mois d’avril, l’indice composé S&P/TSX a chuté de près de 10 % en l’espace de quelques séances boursières – la pire période depuis mars 2020 – en raison des craintes d’une guerre commerciale ouverte, avant de rebondir lorsqu’une pause partielle des menaces de droits de douane américains a été annoncée le 9 avril.)
Certains employés se disent même angoissés par des discours extrêmes, comme les spéculations sur une éventuelle annexion du Canada par les États-Unis évoquées dans des commentaires politiques pendant le conflit. Cette hypothèse, bien que peu réaliste, peut être déstabilisante lorsqu’elle est lancée dans le débat public. Tous ces éléments se traduisent par une main-d’œuvre stressée. Au milieu de l’année, ces inquiétudes se sont concrétisées par des annonces de mises à pied et des gels d’embauche, ce qui a encore érodé le moral des travailleurs. Même les personnes dont l’emploi n’est pas immédiatement menacé pourraient ressentir une pression indirecte. Il est essentiel que les employeurs canadiens reconnaissent ces préoccupations et prennent des mesures proactives pour soutenir leurs équipes.
Face aux conflits commerciaux en cours et à la volatilité économique, les employeurs canadiens peuvent recourir à plusieurs stratégies pour stabiliser leurs activités et leur main-d’œuvre.
Prévoir divers scénarios et rester agile : Dans un environnement imprévisible, il est essentiel de prévoir des scénarios. Les entreprises devraient élaborer des plans d’urgence en fonction de divers scénarios, que ce soit une escalade tarifaire complète ou une résolution négociée. Ces plans peuvent consister à prévoir les conséquences financières associées à divers taux hypothétiques d’augmentation des droits de douane et de définir « plans d’action » pour chacun (par exemple, les mesures à prendre si les tarifs doublent ou s’ils sont levés). Comme l’a indiqué le chef de la direction de la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique, les entreprises doivent « s’appuyer à nouveau sur [leurs] compétences tout en se concentrant sur ce qu’elles peuvent contrôler ». Cela signifie qu’elles doivent rester souples : être prêtes à réorienter leurs activités ou à redéployer leurs ressources dans un délai très court. De nombreuses entreprises ont appris pendant la pandémie à fonctionner avec agilité, et ces leçons sont inestimables aujourd’hui. Encouragez votre équipe de direction et vos cadres à revoir et à mettre à jour les plans d’action régulièrement à mesure que de nouvelles informations sont diffusées. Ne pensez pas que la situation se résoudra d’un coup; préparez-vous à des rebondissements, comme des exemptions tarifaires temporaires ou des augmentations soudaines, et intégrez-les dans vos plans.
Optimiser les coûts et préserver la trésorerie : Une gestion plus rigoureuse des coûts peut aider à résister à la tempête. Examinez minutieusement les budgets pour détecter les dépenses non essentielles qui peuvent être repoussées. Envisagez de reporter les gros investissements ou les plans d’expansion jusqu’à ce que les perspectives s’éclaircissent. Il est également judicieux de renforcer les liquidités – par exemple en utilisant des lignes de crédit ou en constituant des réserves de trésorerie – au cas où les ventes diminueraient ou les coûts des intrants augmenteraient. « Réduisez vos coûts dans la mesure du possible », conseille Fiona Famulak, de la Chambre de commerce de la Colombie-Britannique. Certaines entreprises prennent des mesures créatives pour protéger leurs marges. Une entreprise de restauration d’Edmonton a créé un système dynamique de suivi des coûts pour ses cent ingrédients les plus utilisés afin de pouvoir appliquer un « supplément tarifaire » aux commandes des clients si les coûts des intrants augmentent de façon inattendue. Ce type de stratégie de tarification réactive, bien qu’il s’agisse d’un dernier recours, peut aider une entreprise à survivre en répercutant certains coûts de manière transparente. L’essentiel est d’être proactif – d’identifier les points sensibles dans votre structure de coûts et de remédier aux inefficacités dès maintenant, afin de disposer d’une marge de manœuvre en cas d’aggravation de la situation.
Diversifier les chaînes d’approvisionnement et les marchés : Le conflit tarifaire est un rappel brutal des risques d’une dépendance excessive à l’égard d’un seul partenaire commercial. Dans la mesure du possible, recherchez d’autres fournisseurs en dehors des États-Unis pour les matériaux ou les stocks essentiels, ou approvisionnez-vous davantage sur le marché national. Même si les fournisseurs américains restent vos principaux partenaires, le fait d’avoir des sources secondaires (au Canada ou dans d’autres pays) peut réduire votre vulnérabilité aux droits de douane ou aux perturbations transfrontalières. De même, envisagez de diversifier votre clientèle et vos marchés d’exportation. Si votre stratégie de croissance était fortement axée sur les États-Unis, vous pourriez intensifier vos activités de marketing en Europe ou en Asie afin de trouver de nouvelles sources de revenus. Les agences gouvernementales de promotion du commerce, comme Exportation et développement Canada, peuvent vous aider à repérer de nouveaux débouchés. À long terme, une empreinte commerciale plus diversifiée rendra votre entreprise moins exposée aux politiques d’un seul pays. Profitez également des accords commerciaux autres que l’ALENA ou ACEUM – par exemple, les accords du Canada avec l’UE ou le PTPGP – pour contrebalancer la volatilité du marché américain. De nombreuses entreprises canadiennes ont réagi en veillant à ce que leurs produits soient conformes aux règles de l’ACEUM, évitant ainsi les droits de douane américains. En mai, environ 90 % des exportations canadiennes vers les États-Unis étaient conformes à l’ACEUM et donc exemptées des droits de douane imposés par M. Trump (source : reuters.com). Cela montre comment l’adaptation de votre chaîne d’approvisionnement (par exemple, en utilisant plus de contenu nord-américain dans la fabrication) peut directement protéger votre entreprise. De même, certains exportateurs se sont réorientés pour augmenter le volume de leurs exportations vers d’autres pays – la part des exportations du Canada vers les États-Unis par rapport au total des exportations est passée de 78 % à 68 % entre l’été 2024 et l’été 2025, ce qui reflète les efforts déployés pour cultiver d’autres marchés. La diversification peut s’avérer difficile et n’est pas immédiate, mais même des mesures graduelles peuvent réduire les risques.
Tirer parti des programmes d’aide gouvernementaux : Veillez à tirer pleinement parti des mesures d’allègement proposées par les autorités canadiennes. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont mis en place des mesures de soutien pour aider les entreprises et les travailleurs touchés par les nouveaux droits de douane. Par exemple, le gouvernement fédéral a temporairement renoncé à la période d’attente d’une semaine de l’assurance emploi dans le cas des mises à pied liées au différend commercial et a assoupli les règles de l’assurance emploi afin que les indemnités de départ ne retardent pas le versement des prestations (pm.gc.ca) – ce qui peut atténuer les conséquences pour les employés si vous devez absolument procéder à des mises à pied.
Les chefs d’entreprise doivent également prendre note des mécanismes de report d’imposition existant : le versement de l’impôt sur le bénéfice des sociétés et de la TPS et la TVH qui étaient exigibles au printemps a été reporté au 30 juin 2025, ce qui a permis aux entreprises canadiennes de disposer de 40 milliards de dollars de liquidités. En outre, de nouvelles facilités de financement fédérales et le financement accru des agences de développement régional ont été mis en place pour aider les entreprises à traverser cette crise. La situation ayant évolué à la fin de l’été, d’autres mesures de soutien ont été prises. En août, Ottawa a créé une mesure d’encouragement à la production de véhicules électriques permettant aux constructeurs automobiles qui continuent de fabriquer leurs produits au Canada d’importer un certain nombre de véhicules fabriqués aux États-Unis en franchise de droits de douane (malgré les contre-tarifs du Canada sur les automobiles), récompensant ainsi les entreprises qui ne délocalisent pas leur production. Début septembre, le gouvernement fédéral a dévoilé un vaste programme d’aide appelé « Fonds de réponse stratégique », qui comprend 5 milliards de dollars pour aider les entreprises touchées par la hausse des droits de douane américains, des garanties de prêt étendues pour les petites et moyennes entreprises et un programme de requalification pour les 50 000 travailleurs concernés (source : globalnews.ca). Certaines industries bénéficient d’une aide particulière; par exemple, un programme de soutien de 370 millions de dollars a été annoncé pour les producteurs de canola touchés par les droits de douane de 75 % imposés par la Chine sur le canola canadien en guise de représailles. Le gouvernement a également renoncé à des mesures réglementaires susceptibles de peser sur les entreprises touchées par les droits de douane ou les a adaptées : il a suspendu le quota de vente de véhicules électriques pour 2026, qui aurait obligé les constructeurs automobiles à vendre un certain pourcentage de véhicules électriques, reconnaissant que les constructeurs automobiles avaient besoin de flexibilité alors qu’ils étaient confrontés à un contexte commercial incertain. De même, les conditions d’admissibilité à l’assurance emploi ont été assouplies et la durée de versement des prestations a été prolongée pour les personnes mises à pied en raison des perturbations tarifaires. Tenez-vous au courant des programmes tels que le programme de Travail partagé (qui permet au personnel de travailler à temps réduit tout en recevant une partie de l’assurance emploi, ce qui aide à éviter les mises à pied) ou des subventions provinciales destinées aux industries touchées par la crise. Ces aides pourraient être déterminantes pour maintenir vos activités et garder votre main-d’œuvre pendant les périodes difficiles. Pour connaître tous les programmes qui pourraient s’appliquer à votre entreprise, consultez les sites web des gouvernements ou des associations sectorielles – de nouvelles mesures sont créées à mesure que la situation évolue, de sorte que ce qui n’était pas disponible il y a quelques mois peut l’être aujourd’hui.
Maintenir une communication ouverte avec les parties prenantes : Communiquez proactivement avec vos principales parties prenantes, notamment vos employés, vos fournisseurs, vos clients et vos investisseurs, sur la manière dont votre entreprise gère la situation tarifaire. L’incertitude est plus facile à supporter lorsque chacun est tenu informé. Si vous modifiez des commandes ou des calendriers de production, accordez à vos fournisseurs le plus de temps possible et collaborez avec eux pour trouver des solutions. Avec vos clients, soyez transparents si vous prévoyez des retards de livraison ou si vous devez rajuster vos prix en raison des coûts tarifaires; dans bien des cas, les clients seront compréhensifs s’ils sont tenus informés. En interne, impliquez vos équipes (plus d’informations à ce sujet dans la section suivante) afin qu’elles comprennent les mesures prises pour faire face à la situation. Des communications claires et fréquentes peuvent préserver la confiance, précieuse en période de turbulences.
Il est également judicieux de tester des scénarios de communication : Prévoyez ce que vous direz à vos employés ou à vos clients si, par exemple, les droits de douane passent à un niveau supérieur du jour au lendemain ou si, à l’inverse, une avancée permet leur élimination. En y réfléchissant à l’avance, vous serez en mesure de réagir calmement et de manière crédible. Enfin, n’oubliez pas vos investisseurs ou vos créanciers – ils seront heureux de savoir que la direction maîtrise la situation. Des comptes rendus réguliers sur la manière dont l’entreprise atténue les risques (sans divulguer d’informations sensibles) peuvent maintenir la crédibilité de l’entreprise sur les marchés financiers ou auprès de votre banque, ce qui peut s’avérer crucial si vous avez besoin d’une certaine flexibilité financière.
En période d’incertitude, le devoir de prendre soin de vos employés devient encore plus crucial. Soutenir le bien-être et la santé financière des employés n’est pas seulement de la bienveillance : cela peut contribuer à maintenir la productivité et la loyauté lorsque les tensions externes sont élevées. Les responsables canadiens des RH devraient envisager plusieurs approches pour soutenir leurs effectifs pendant le conflit tarifaire :
Tirer parti de vos programmes d’avantages sociaux et d’aide : Rappelez aux employés quelles sont les ressources à leur disposition pour les aider à gérer le stress ou les difficultés financières. Par exemple, la plupart des régimes d’avantages sociaux comprennent un programme d’aide aux employés (PAE); assurez-vous que vos employés savent comment en profiter. Les PAE offrent souvent des services de consultation et des ressources d’autoassistance pour composer avec le changement, l’anxiété ou l’incertitude. Ils peuvent également proposer des services d’accompagnement financier ou des outils de mieux-être. Ces outils peuvent être précieux pour les employés qui ont des soucis d’argent ou que la volatilité économique angoisse. De plus, vérifiez si vos régimes d’assurance maladie couvrent des services de soutien à la santé mentale (comme des séances de consultation psychologique) et faites-en la promotion auprès de votre équipe. Certains employeurs bonifient leurs avantages sociaux pour contrer les effets de l’inflation, par exemple en augmentant les montants de garantie ou en ajoutant des journées de mieux-être. Toute mesure renforçant votre soutien sera bien accueillie par vos employés.
Favoriser la littératie financière et offrir des conseils sur les marchés : De nombreux employés s’inquiètent de leur avenir financier, qu’il s’agisse de la gestion quotidienne de leur budget face à la hausse des prix ou de l’incidence des fluctuations des marchés sur leur épargne-retraite. Les employeurs peuvent contribuer à améliorer la littératie et la résilience financières. Envisagez d’organiser pour vos employés des ateliers ou des webinaires sur le bien-être financier. Divers sujets pourraient y être abordés, comme l’établissement d’un budget en période d’inflation, les stratégies de gestion de l’endettement ou les principes de base des placements dans les REER et les CELI. Vous pourriez organiser ces séances en collaboration avec votre fournisseur de régime de retraite ou un conseiller financier. D’ailleurs, les fournisseurs de régimes de retraite collectifs proposent généralement des ressources prêtes à l’emploi sur la gestion de la volatilité des marchés et des outils de planification de la retraite (calculateurs en ligne, séminaires sur les placements, etc.). En sensibilisant vos employés à la façon d’ajuster leurs plans financiers, vous les aiderez à se sentir plus en contrôle. Par exemple, expliquer à vos employés l’importance de conserver leurs placements à long terme malgré les baisses temporaires des marchés peut apaiser leurs inquiétudes concernant la retraite ou leur REER. Si votre régime propose des consultations individuelles avec un conseiller en retraite, encouragez vos employés à en profiter. Des outils d’information sur les marchés et des conseils financiers impartiaux peuvent contribuer grandement à apaiser la peur de l’inconnu. Les employés plus confiants quant à leurs finances personnelles seront moins distraits au travail.
Communiquer de manière transparente et fréquente : En période de turbulences, la visibilité et l’honnêteté de la direction sont primordiales. Assurez-vous de communiquer régulièrement avec vos employés sur la façon dont l’entreprise réagit à la conjoncture économique. La communication peut prendre diverses formes – réunions mensuelles, courriels hebdomadaires du chef de la direction ou réunions de service, selon ce qui convient à votre organisation – à condition que le propos soit cohérent. Transmettez toute l’information possible sur la situation. Par exemple, si les droits de douane américains ont entraîné une hausse de vos coûts de production, vous pouvez expliquer que l’entreprise met en œuvre des mesures d’économie (gel des déplacements, etc.) pour éviter d’éventuelles répercussions sur la main-d’œuvre. Si l’activité ralentit, n’hésitez pas à en parler et réaffirmez votre volonté de préserver la sécurité d’emploi de votre équipe chaque fois que l'occasion se présente. Les employés savent que leurs dirigeants n’ont pas de boule de cristal, mais ils accordent une grande importance à la franchise. Une communication transparente favorise la confiance et la crédibilité. Elle fait aussi taire les rumeurs : en l’absence d’informations, les employés peuvent imaginer le pire. En les tenant informés régulièrement, vous démontrez que la direction maîtrise la situation et se soucie des intérêts du personnel. Même quand la nouvelle est difficile (par exemple, une réduction nécessaire des heures de travail), la communiquer avec franchise et empathie contribuera à la résilience des employés. Encouragez également la communication réciproque : mettez à disposition des canaux de communication (sondages, séances de questions, boîtes à suggestions anonymes) pour que les employés puissent exprimer leurs préoccupations ou leurs idées. Faire en sorte que les employés se sentent entendus est un puissant moyen de leur redonner le moral lorsque des événements extérieurs les rendent impuissants.
Aussi, célébrez les petites victoires : votre équipe a-t-elle réussi à obtenir un nouveau client non américain ou à trouver un fournisseur moins cher? Diffusez la nouvelle. Le fait de rappeler aux employés que leurs efforts portent leurs fruits peut contrebalancer les mauvaises nouvelles propagées dans les médias.
Enfin, faites preuve d’empathie et de souplesse. N’oubliez pas que les employés peuvent connaître des difficultés dans leur vie personnelle : par exemple, l’emploi de leur conjoint pourrait être menacé par les tarifs douaniers ou ils pourraient devoir réduire leurs dépenses personnelles en raison de l’augmentation du coût de la vie. Dans la mesure du possible, faites preuve de souplesse : autorisez le télétravail ou des horaires aménagés si cela permet à un employé de gérer son stress ou de réaliser des économies (par exemple, sur ses déplacements).
Si le travail d’un employé est ralenti par les effets du différend tarifaire, envisagez de le réaffecter temporairement à un secteur plus actif; vous pourriez ainsi lui offrir une certaine stabilité tout en soutenant les équipes qui ont besoin d’un coup de main supplémentaire. Un environnement de travail stimulant renforcera la loyauté et le bien-être mental des employés. En créant un climat de sécurité et de collaboration, vous protégez votre équipe contre les incertitudes du monde extérieur. Tous examinent avec attention la manière dont les dirigeants gèrent cette crise. En donnant la priorité à vos collaborateurs, vous pourrez non seulement résister à la tempête, mais aussi en sortir avec une équipe plus forte et plus unie.
Tant que le différend tarifaire entre les États-Unis et le Canada continuera d’évoluer, nous continuerons d’informer les employeurs canadiens. Notre équipe expérimentée travaille activement en partenariat avec des sociétés d’assurance et de placement pour optimiser la couverture et les solutions financières, aidant ainsi les organisations à maintenir des programmes d’avantages sociaux rentables en dépit de l’incertitude actuelle. Grâce à notre gestion proactive des décisions politiques et à une analyse continue des marchés, nous pouvons vous aider à faire face à l’instabilité économique avec confiance.
Si vous vous interrogez sur l’incidence de ce différend tarifaire sur vos avantages sociaux, vos régimes de retraite ou vos politiques de gestion des ressources humaines, n’hésitez pas à communiquer avec nous. Nous pouvons vous aider à faire le point sur votre couverture actuelle et à examiner de possibles stratégies visant à maintenir la stabilité dans un marché en ébullition. Qu’il s’agisse d’adapter les modèles de financement ou de mettre à profit des ressources en matière de mieux-être, nous comprenons l’incidence globale que la situation tarifaire peut avoir sur vos activités et votre main-d’œuvre. À La Corporation People, notre priorité est de vous aider à vous adapter et à prospérer malgré ce contexte difficile. Communiquez avec nous pour savoir comment nous pouvons soutenir votre organisation en cette période d’incertitude.